Interlude 28.La jupe.
A toutes celles qui croient se connaitre... Et aux autres.
A Tox en particulier.
La première fois qu'elle avait vu
cette fille, elle avait immédiatement douté de son orientation
sexuelle.
Eléonore avait tout de la jeune fille
bien rangée des beaux quartiers. Fille unique de riches parents qui
l'adoraient, sa famille avait un air de scène pastorale. Tout lui
réussissait, les cours et toutes les disciplines scolaires, aucune
de lui résistait. Pour elle, la musique était un jeu d'enfant,
monter à cheval un art maitrisé, danser faisait partie d'elle,
chanter était comme une seconde nature.
Ses professeurs admiraient son esprit
vif et curieux, ses répliques pertinente et son sérieux autant que
sa modestie. Ses très nombreux amis l'admiraient sans jamais pouvoir
la jalouser d'une quelconque façon, elle avait un cœur grand comme
le monde et une générosité sans faille. Loin d'être naïve, elle
aimait faire croire aux autres qu'ils avaient raison même lorsque
c'était faux et faisait de doux reproches qui sonnaient comme des
compliments.
Ses cheveux châtains légèrement
ondulés encadrait son joli visage de porcelaine et ses yeux en
amandes à la ligne parfaite pétillaient d'un vert bleu qui devenait
gris les jours de pluie. En somme, elle était parfaite.
Adèle de son côté était était
plutôt banale et transparente, un souffle d'air frais dans une
pièce. Tout en elle était classique, de sa taille à son caractère
toujours modéré. Elle ne se mettait que très rarement en colère,
la vie passait au dessus d'elle comme un doux rêve et son opinion
jamais tranchée se reflétait dans ses devoirs, toujours moyens. Ses
cheveux noirs bouclés et assez courts cachaient son visage et elle
passait son temps à les remettre à leur place. Sa peau couleur
chocolat était peu être sa seule particularité frappante.
Les deux jeunes femmes c'étaient vue
pour la première fois le jour de la rentrée de seconde, dans cette
cour submergée de monde. Elles s'étaient à peine aperçues et
n'étaient restée l'une pour l'autre qu'une vague impression, un
picotement particulier sur la peau.
La première fois que réellement,
Adèle avait posé les yeux sur Eléonore, c'était un jour de pluie,
elle se trouvait à la vie scolaire, argumentant sur son retard comme
à peu près tout les lundis matin. Le surveillant, amusé par son
explication la laissait continuer avec un l'air blasé qu'on les gens
en ce premier jour de la semaine. Puis elle entra. C'était en mai,
il faisait chaud et on assistait peu être à la première pluie
orageuse et lorsqu'elle était sortie ce matin, mystérieusement en
retard, elle n'avait pris ni veste ni parapluie.
L'eau dégoulinait sur sa chemise
blanche, laissant voir son soutient gorge de dentelle blanche à
travers les plis, ses longs cheveux châtains chatouillaient son cou
pâle et laissait gouter l'eau entre ses deux seins. Son corps
tremblait sous la morsure du froid et elle claquait légèrement des
dents, serrant ses lèvres rendues très rouge par l'eau glacée.
Le monde s'écroula pour Adèle, ses
convictions, ses fantasmes se retournèrent, son estomac suivit la
même voie, toute sa peau fut parcourue d'un frisson et une chaleur
méconnue explosa dans son bas ventre. Son cœur s'emballa et courut
le cent mètre en moins de dix seconde puis le monde s'arrêta.
« Je suis en retard, désolée!
Fit-elle de sa voix chantante.
- Tu n'est pas la seule Eléonore. Tu
avais cour avec qui?
Une fois le retard justifié et excusé,
les deux jeunes filles sortirent ensemble du bureau.
- Alors, tu as cours ou? Tentât Adèle,
décontractée.
- Au premier, et toi? Répondit
naturellement l'autre jeune fille.
- Au premier.
Elles se sourirent et montèrent
ensemble.
La deuxième fois qu'elles se virent,
c'était en cour d'EPS qu'elles partageaient. Adèle détestait se
déshabiller et faisait toujours cela le plus vite possible, retirant
ses vêtement comme s'ils la brulaient pour enfiler son sur-vêtement
plus vite que la lumière. Ensuite elle s'assit sur le banc et jeta
un coup d'œil furtif sur sa droite, ou Eléonore se changeait
beaucoup plus lentement, exposant sa taille fine et sa poitrine
enveloppée dans de la dentelle noire à ses yeux. Une fois de plus,
le sang afflua aux joues d'Adèle et cette même chaleur explosa en
elle. Soudain, Eléonore croisa le regard de l'adolescente sur elle
et la jeune fille ne détourna pas le regard, au contraire, elle
plongeât son regard dans le sien pour s'y bruler les pupilles. Si
elle ne savait pas encore ce qui se passait en elle, ou si elle
refusait d'y mettre des mots, ses yeux le crièrent à sa place. Tout
le désir qu'Adèle portait à Eléonore passât en un instant et
vint tâcher la pureté de l'autre.
Soudain, l'adolescente se rendit compte
de ce qu'elle faisait et détourna les yeux. Elle s'aperçut alors
qu'elles étaient seules dans le vestiaire.
A la grande surprise de la jeune fille
noire, sa camarade vint s'assoir à côté d'elle et lui demandât
gentiment:
« Comment tu t'appelles? »
Le jeu commençât à leur troisième
rencontre. Elles avaient toutes les deux été invitées à la même
fête d'anniversaire. C'était deux mois avant les vacances. Elles
avaient bien sûr un peu discuter au détour d'un couloir ou dans un
vestiaire vide, mais les mots manquaient toujours à Adèle et une
peur sans nom la saisissait sur ce qui se passait dans son cœur et
plus encore, dans son ventre à chaque fois qu'elle pensait à
Eléonore.
La musique était lourde, aussi lourd
que les regards d'Adèle vers Eléonore. Cette dernière était
magnifique dans sa jupe rouge à volant et son débardeur blanc.
Beaucoup de garçons lui tournaient autour, l'invitaient à danser et
elle leur souriait toujours en acceptant. Adèle se demandait si
c'était elle ou si la jeune fille la regardait aussi de temps en
temps, lorsqu'elle dansait ou lorsqu'elle buvait son verre de punch.
Quelques heures plus tard, tout le
monde riait joyeusement, sauf deux jeunes filles dans la salle de
bain, penchée au dessus d'une clope qu'elles allumaient. Eléonore
tenait le briquet pour allumer le join d'Adèle. Elle ne comprenait
pas pourquoi elle l'avait suivit lorsque celle-ci lui avait proposée,
ni pourquoi elle était tant intrigué par cette fille si banale.
Qu'es-ce qu'elle avait de plus que les autres qui retienne son
attention. La jeune fille leva les yeux vers son amie à la peau
brune et tomba dans son regard presque entièrement noir et en eut le
souffle coupé. Comme cette fois dans les vestiaire, le regard
anthracite l'avalait et elle se laissait tomber dedans avec un
plaisir qu'elle ne comprenait pas. Ses joues rosirent immédiatement
et elle mordilla sa lèvre inférieur, légèrement gênée.
Adèle sourit, découvrant des dents
d'une blancheur immaculée et porta la cigarette à ses lèvres pour
en aspirer une bouffée sous le regard fasciné d'Eléonore qui
tendit la main.
« Tu veux essayer? »
Demandât Adèle, surprise.
Pour toute réponse, la jeune fille
attrapa la cigarette qu'on lui tendait et la porta à ses lèvres.
Elle avait déjà fumer des cigarettes sous la pression de ses amies
mais ce qu'elle faisait aujourd'hui, elle le faisait pour plaire,
pour séduire et en âme et conscience.
Elle se sentie bien, flottante dans une
douce réalité ou l'alcool et le join mêlé rendait tout possible.
Les yeux noirs d'Adèle semblaient l'appeler et elle se sentait
répondre.
Adèle avait déjà embrassé des
garçons, certains très mignons, mais ils étaient tous laids et
informes comparé à Eléonore. Elle aussi planait dans une autre
dimension ou la musique résonnait en sourdine derrière elle, mais
il n'y avait que cette femme.
De son côté, l'adolescente ne savait
plus trop ou elle en était et sourit à sa partenaire avant de faire
un pas en avant. Elle avait envie d'être embrassée par cette fille,
maintenant, tout de suite avant que la réalité ne retombe sur ses
épaules.
Adèle passât sa main autour de la
taille de l'autre adolescente et la plaqua contre elle avant de se
pencher doucement vers les lèvres rougie d'Eléonore.
C'était un baiser doux, chaud et
chaste, juste une pression de lèvres contre lèvres. Puis elle se
séparèrent, s'observèrent une seconde avant de finalement, revenir
l'une vers l'autre. Ce n'était pas assez. Jamais avant cela,
Eléonore n'avait embrassé « à la française », ça la
répugnait mais en cet instant, cela semblait naturel. Ce n'était
pas mouillé comme elle l'avait imaginé, juste humide et chaud.
L'autre jeune femme attrapa ses lèvres entre les siennes puis les
laissa avant de revenir les englober. Les lèvres d'Eléonore
s'entrouvrirent d'elles-même pour l'accueillir et son cœur se mit à
battre fort contre sa poitrine.
Après cela, elles se regardèrent et
se sourirent.
« C'est notre secret... »
Même lorsque la réalité vint les
reprendre, ce baiser restât un bon souvenir, mais chacune regrettait
d'avoir été guidée par un stupéfiant et elles savaient que
c'était leur premier et dernier baiser. Du moins, elles en étaient
persuadées.
Elles se croisèrent dans un couloir
désert le dernier jour de cour. Elles s'arrêtèrent l'une en face
de l'autre et sans qu'elles n'aient rien à se dire, sans avoir même
vérifié que personne ne les verraient, elles s'embrassèrent à
nouveau. Ce baiser là fut peut être plus maladroit sur le début,
du moins, il leur apparut ainsi. Mais très vite, il devint plus
assuré, plus sensuel, plus passionné. Aucune d'entre elles ne
comprenaient pourquoi elles avaient un tel besoin de se toucher alors
que finalement, elles ne se connaissaient pas tant, mais elle en
avait besoin.
Après cela, elles marchèrent dans le
couloir sombre, leurs doigts entremêlés et ne se lâchèrent qu'au
dernier moment.
« Dis moi ou tu habites... »
La rentrée suivante, elles
traversèrent ensemble la cour bondée de monde avec le vague
souvenir d'un picotement. Leurs mains se frôlaient et leurs sourires
ne disparaissaient pas alors qu'elles regardaient dans quelles
classes elles étaient. C'est avec surprise qu'elles se retrouvèrent
dans la même mais d'un accord tacite, décidèrent de jouer le jeu
de l'amour secret, elles ne se sentaient pas prêtes à avouer au
monde entier qu'elles s'aiment. Au cour des deux mois de vacances,
elles avaient appris à se connaitre sans jamais réussir à savoir
d'où leur venait ce besoin irrépressible d'être ensemble, mais
elles avaient finit par l'accepter.
Chaque fois qu'elles en avaient
l'occasion, elle se retrouvaient seules dans un coin sombre de
couloir désert et se touchaient, s'embrassaient. Ce jour là,
Eléonore avait une envie sourde qui brulait au fond d'elle alors que
la femme qu'elle aimait lui caressait doucement la poitrine en
l'embrassant dans le cou. Elle glissa une main sous le tee-shirt
d'Adèle et se pencha pour l'embrasser. La jeune femme laissa
échapper un petit soupir de plaisir lorsque les lèvre douce et
pleine d'Eléonore vinrent se poser sur son cou, la faisant
frissonner. L'adolescente remonta en léchant le cou de son amoureuse
jusqu'à l'oreille pour susurrer:
« Adèle, j'ai envie de toi. »
C'est la chambre au lourdes tentures
rouge d'Eléonore qui les accueillit ce jour la. Les murs blancs
étaient devenus roses par le soleil filtrant à travers les lourds
tissus. Adèle était rentrée à la suite de sa petite amie qui lui
maintenait les yeux cachés. Puis Eléonore s'allongeât sur le lit
et autorisa Adèle à ouvrir les yeux. Sur le lit, l'adolescente en
sous vêtement de dentelle noire l'attendait. La femme chocolat
sourit et retira ses chaussures sous le regard attendrit de la femme
qui l'attendait. Elle se déshabilla de manière naturelle, mais il
suffisait qu'elle dévoile son cors pour qu'Eléonore perde ses
nerfs, son cors bouillonnait.
C'était leur première fois à toutes
les deux, elles ne savaient ni l'une ni l'autre comment cela se
passait entre deux femmes, pas plus qu'avec un homme, mais elle
savait comment cela se passait entre deux humains qui s'aiment et
c'était suffisant.
Adèle vint rejoindre son âme cœur à
quatre pattes et la jeune fille s'allongeât lascivement sur le lit.
Doucement, l'adolescente brune lui caressa les seins en lui souriant,
laissant leurs regards fondre l'un dans l'autre puis avec beaucoup de
douceur, Eléonore mit sa main derrière la nuque de son amoureuse et
l'attira à elle. Leurs lèvres se scellèrent un instant puis
Eléonore entrouvrit les siennes et leurs langues se caressèrent
doucement tandis qu'Adèle s'allongeait sur sa partenaire
délicatement. La jeune fille châtain caressa le dos de sa compagne
puis ses fesses et lorsqu'elle remonta, dégrafa l'étoffer restante.
De son côté, Adèle fit de même, obligeant Eléonore à se
cambrer, laissant leurs deux corps se rencontrer. Les caresses
étaient douces et chaudes, assurées malgré le manque d'expérience,
elles glissaient sur la peau de l'une et l'autre avec avec lenteur.
Adèle descendit le long de la cuisse de sa petite amie et remonta à
l'intérieur, faisant frissonner l'autre adolescente qui ouvrit
doucement les jambes. Leurs baisers coulaient et peu à peu, la pièce
s'emplit de soupirs et de gémissement sourds coupés par de petits
gémissement de plaisir. Elles roulaient sur le drap, observant le
contraste entre leurs peaux. Haletante, Eléonore rejeta sa tête en
arrière, s'arquant contre le corps de son aimée, l'appelant dans un
mantra auquel son amie répondait par des baisers sur son cou, ses
seins dressé et son ventre. Le sensation en elle était ardente,
leur peau semblait de trop et le plaisir qui montait en elle semblait
de pas avoir de limites. Gémissant, elle ouvrit la bouche pour dire
quelque chose mais le son s'étouffa dans un cri de plaisir. Adèle
était douée, mais c'était parce que c'était Eléonore, elle
savait comment la faire frissonner et apprenait à présent à la
faire hurler de plaisir. Doucement, traçant un sillon humide le long
du ventre tendu de la jeune femme, elle descendit vers cet endroit
intime.
Pour Eléonore, la pièce changea
doucement de ton, de couleur, de chaleur et l'univers lui apparut
différemment alors qu'elle se sentait perdre pieds sous la langue
chaude d'Adèle.
« Adèle... »
Le lendemain matin, Adèle se réveilla
seul dans le lit et fut prise d'un instant de panique. Elle se
redressât pour apercevoir celle qu'elle aimait, nue, en face de son
armoire entrain de choisir sa tenue du jour. Elle l'observa
silencieusement quelques minutes avant de déclarer:
« Met ta jupe rouge, celle de
notre premier baiser... »
L'autre jeune fille se retournât et
lui sourit avant d'accepter. Elle sortie la jupe et se prépara à
enfiler sa culotte, lorsque soudain, elle s'arrêta... Et passât
directement à la jupe.
« Qu'es-ce que tu fais? Demandât
Adèle.
- Ce sera notre secret, j'en ai
envie... » Elle s'approcha du lit et s'agenouilla sur le lit
pour embrasser l'autre adolescente puis lui prit doucement la main et
la posa sur son intimité, à travers la jupe.
« Personne ne le saura sauf
toi... Et... J'ai envie que tu me touches au lycée...
Adèle leva les yeux vers Eléonore
avec un air surpris.
- Quand on te voit la première fois,
on imagine tout sauf ça.
- C'est faux...La première fois que tu
m'as vue, ce jour de pluie, tu m'a déshabillée du regard... Tu y a
pensé.
- C'est vrai. »
Sur le chemin pour aller au lycée,
Eléonore tournoyait sur elle même, faisant voleter sa jupe courte
jusqu'au point ou l'on pouvait presque s'apercevoir qu'elle ne
portait rien pour s'arrêter et sourire avec un petit air lubrique à
Adèle qui riait. Oui, c'était leur petit secret.
Galopant sur le trottoir en tournoyant
comme une bienheureuse, Eléonore voyait le ciel bleu au dessus
d'elle et les yeux noirs d'Adèle lorsqu'elle fermait les siens. Le
vent contre sa peau avait soudain un autre parfum, la vie lui
semblait changer par le seul fait de se sentir enfin complète, aimée
sans limite. Elle aimait le secret qu'elle partageait avec Adèle,
son homosexualité, le fait qu'elle ne portait pas de culotte
aujourd'hui et le monde semblait s'agenouiller à ses pieds.
Elle souriait aux anges et sa dernière
pensée fut pour la femme de sa vie avant que la terre ne se
retourne. Une douleur immense lui perfora le cœur, le corps,
l'esprit. Elle n'entendit pas le cri d'Adèle et n'eut pas le temps
de comprendre ce qui lui arrivait. Lorsqu'elle heurta le sol, elle
était morte et sa jupe rouge étalée autour d'elle emporta son
secret dans sa tombe.